On pourrait croire à priori que le processus de guérison d’une blessure se produit en dehors de l’influence de nos pensées et croyances. En effet, comme le corps est une machine bien rodée en général, personne ne demande consciemment à ses cellules de commencer un processus inflammatoire, de le diminuer progressivement et ainsi de procéder à la réparation des tissus blessés. De la même manière, malgré toute notre bonne volonté, les petits bobos ne passent pas toujours du jour au lendemain.

En conséquence, beaucoup de gens tendent à voir la guérison de leur corps et le retour au sport comme un processus plus ou moins «passif», se déroulant en dehors de leur contrôle et dont la durée est nébuleuse…mais généralement trop longue pour ce que l’on voudrait! Cela ne nous empêche pas en contrepartie d’avoir des attentes par rapport à notre cheminement thérapeutique et ce qu’il nous faudrait pour aller mieux.

Bien que le résultat ne soit pas instantané, les attentes d’une personne ont un impact sur la vitesse et la perception de récupération de celle-ci. Une étude de Bishop et al. (2013) démontrait que lorsqu’une personne a des douleurs au cou, le fait que celle-ci s’attende à une récupération complète versus à garder des séquelles de l’accident influence ses chances de bien évoluer à 1 mois après le début des traitements. Ainsi, la personne plus « optimiste » a de meilleures chances de s’en sortir sans traces de sa blessure que celle qui est convaincue de garder des limitations ou des raideurs.

En plus des attentes par rapport aux résultats finaux, les moyens d’intervenir comptent eux aussi. En effet, certains sont convaincus d’avoir besoin de faire « craquer » ou au contraire d’avoir absolument besoin d’exercices. Les chances de bien évoluer de ces « convaincus » seront moins bonnes si le thérapeute ne procède pas à l’intervention « attendue » par le patient. Une partie de ce phénomène vient du fait que le patient est un « expert » de son propre corps. Un autre phénomène contributoire est le fait qui si tu penses que cela va fonctionner pour toi, l’intervention a effectivement plus de chances de conduire au résultats voulus.

Dans cette discussion, on est vraiment proche du phénomène de l’effet placebo. Citée dans la même étude dont je vous parlais plus haut, se trouve l’étude de Benedetti et al (2003) où l’on injectait du « normal salin » (lire ici du liquide composé d’eau et d’un peu de sel) à des patients en leur disant que le produit allait soit 1) augmenter leur tolérance à la douleur, ou 2) diminuer leur tolérance à la douleur. Comme de fait, le groupe s’étant fait dire que le produit allait les aider a obtenu globalement de bien meilleurs scores de tolérance à la douleur que l’autre groupe post-injection.

Dans la même lignée, l’étude de Bostick et al. (2016), évaluant l’impact des attentes réalistes, optimistes et pessimistes sur l’évolution de douleurs dues au système nerveux, livrait des conclusions du même genre. Ce qui est intéressant est que les douleurs neurologiques sont généralement plus difficiles à gérer et à résoudre complètement que le musculo-squelettique pur et dur. Le constat est cela dit que les patients avec des attentes réalistes et/ou optimistes s’en sortaient généralement mieux au bout du compte que ceux baignant dans le pessimisme par rapport à leur guérison.

Bon, avant de s’emballer sur l’effet de la « pensée magique », il faut quand même mettre les choses à leur juste place. Si je suis convaincu que je vais m’améliorer, ou à tout le moins relativement certain qu’une amélioration est possible, je vais clairement faire plus d’effort que si je pense que ma tentative est vouée à l’échec. Donc, même s’il y a peut-être une composante biologique au fait que les gens avec une pensée plus positive réagissent mieux au traitement, il y a probablement aussi un aspect comportemental plus difficile à différencier de sa contrepartie psychologique.

Dans les faits, par contre, le constat est clair. Si vous êtes blessé, vaut mieux essayer de voir les choses de manière positive par rapport à votre processus de guérison que l’inverse. Dans le pire des cas, cela ne vous aggravera pas et dans le meilleur, vous irez mieux plus vite!

Sources:

Conscious expectation and unconscious conditioning in analgesic, motor, and hormonal placebo/nocebo responses. The Journal of neuroscience [0270-6474] Benedetti, Fabrizio An.:2003 Vol. :23 iss :10 pg :4315 -4323

Patient expectations of benefit from interventions for neck pain and resulting influence on outcomes. The Journal of orthopaedic and sports physical therapy [0190-6011] Bishop, Mark An.:2013 Vol. :43 iss :7 pg :457 -465

Pain expectations in neuropathic pain: Is it best to be optimistic? European journal of pain (London, England) [1090-3801] Bostick, G P An.:2017 Vol. :21 iss :4 pg :605 -613