Ça fait longtemps que je désire écrire un article de blogue sur le sujet. Je ne prétends certainement pas être experte de l’hypersensibilité, mais je m’y intéresse particulièrement depuis quelques temps, étant moi-même hypersensible. J’ai connu l’existence de ce trait de personnalité tard dans ma vie et je me dis que cela aurait pu changer beaucoup de choses si j’avais su avant. Donc, si je peux aider au moins une personne à mieux se comprendre et s’accompagner au quotidien j’en serai heureuse.
L’hypersensibilité est un trait de personnalité encore méconnu pourtant présent chez approximativement 20% de la population. Malheureusement, ce qui est souvent observé des hypersensibles entraînent parfois des jugements défavorables et même certaines phrases pouvant nous faire dresser le poil sur les bras à nous hypersensibles et intervenants! Souvent perçues comme timides (mais pas exclusivement), anxieuses et même trop gênées et maladroites, les personnes hypersensibles peuvent ainsi être jugées à tort comme étant des personnes peu sociales, n’ayant pas les compétences nécessaires pour foncer dans la vie. Pourtant, lorsqu’elles apprennent à se comprendre et à se respecter, plusieurs d’entre elles sont extrêmement douées dans leur domaine respectif et peuvent certainement faire avancer les choses.
Qu’est-ce que l’hypersensibilité
En premier lieu, il importe de mentionner que l’hypersensibilité n’est pas un diagnostic ou un trouble. Il s’agit d’un trait de personnalité teintant notre relation avec le monde. L’hypersensibilité se caractérise par une sensibilité accrue aux stimuli externes et internes pouvant entraîner une surcharge aussi appelée sursimulation. Cette surcharge s’explique, en bonne partie, par le fait qu’une personne hypersensible analyse continuellement et de façon approfondie les éléments arrivant jusqu’à son cerveau que ce soit des sons, les gestes d’une autre personne, des règles explicites et implicites, des émotions ressenties, des pensées qui se présentes… bref, vous commencez à comprendre, tout ce qui est traité par le cerveau l’est de façon approfondie et peu de choses ne sont pas analysées.
Quelles sont les caractéristiques d’un.e hypersensible?
Les personnes hypersensibles auront davantage tendance à observer les dynamiques de groupes avant d’initier des discussions et de créer des liens. Ce sont des personnes très empathiques qui ressentent « l’énergie » des autres. Donc s’il y a une tension dans l’air, si quelqu’un ne va pas, si un conflit est présent, etc. la personne hypersensible ressent tout cela. Hey oui!! C’est une grande force afin de s’adapter aux personnes avec qui l’on est en interaction (et en intervention!), mais il importe d’apprendre à créer sa bulle afin de ne pas se laisser continuellement imprégner par ces énergies.
Les personnes hypersensibles seront également plus sensibles aux sons, à la luminosité, aux changements de température ou aux sensations physiques (ex. chandail mouillé ou étiquettes de chandail), aux odeurs… bref tous les éléments sollicitant nos sens sont plus « présents » à notre esprit! Lorsque j’accompagne un ou une adolescent.e hypersensible, il arrive souvent que les moments à la cafétéria, les rassemblement importants, les journées entières de cours sous les néons et d’autres éléments de ce type influencent leur bien-être et peuvent les rendre irritables. S’en suit alors une incompréhension de la personne elle-même qui ne se sent pas « normal » et de l’enseignant, du parent ou de l’entraineur qui vit le changement d’humeur de l’adolescent.e. Dans les écrits d’Elaine N. Aron (voir références) cela est bien documenté et lorsque j’ai pris connaissance de cela, sincèrement, ça a complètement changé mon regard face à mes réactions que j’attribuais toutes à l’anxiété (même si parfois je ne comprenais pas vraiment…) en plus de m’aider à mettre des mots sur les adaptations que je préconise pour les personnes que j’accompagne! Il importe tellement de prendre en considération ces éléments et de pouvoir donner une pause au corps et à la tête en fonction des stimulations reçues dans la journée.
En plus des stimulations nommées ci-dessus, si le parent, l’enseignant ou l’entraîneur est d’humeur changeante, cela peut également influencer grandement la capacité de concentration de la personne. Pourquoi? Parce qu’une partie de son cerveau sera occupée à interpréter les signes pouvant la guider afin de s’adapter à la situation et à l’humeur de l’autre. C’est tout un apprentissage à faire afin de 1) ne pas chercher à analyser tout ce qui est ressenti provenant de notre milieu et 2) se distancer des émotions des autres afin qu’elles nous influencent moins au quotidien.
En plus d’être sensible au monde extérieur nous le sommes aussi au monde intérieur. Donc, lorsque nous ressentons une émotion, elle prend beaucoup de place et nous devons apprendre à ce qu’elle ne monopolise pas tout notre être. Nous avons un monde intérieur vraiment riche lorsque nous sommes hypersensibles. Nous réfléchissons sur le sens de tout, cherchons à comprendre les choses, aimons apprendre (étudiant.e pour toujours, levez la main!!) et réinventer le monde comme j’aime dire! Mais tout ça demande de l’énergie !! Donc, il faut aussi apprendre à utiliser cette magnifique force à bon escient au bon moment 🙂
Plusieurs seront plus timides et préféreront s’entourer de peu de personnes afin d’éviter de toujours se retrouver en contexte d’analyse du monde extérieur. Elles seront maladroites par moment puisque étant toujours en train de lire leur environnement et leur monde intérieur, certains éléments peuvent se mélanger et créer des réactions qui semblent peu appropriées dans l’instant présent (en plus de la surcharge qui influence notre humeur!). De plus, le regard de l’autre sur nous apporte remise en question, pression, questionnements, analyse, maladresses et surstimulation… Cela ne veut pas dire que vous ne trouverez pas parmi les hypersensibles des personnes qui ont une vie sociable développée ou qui font des emplois nécessitant plusieurs contacts au quotidien (lire moi entre autres hihi). Comme plusieurs hypersensibles, je peux être très sociable dans un contexte de sport et de travail, mais je ne serai pas la party animal et m’écouterai lorsque tout mon être crie «la dernière chose dont j’ai besoin ce soir c’est d’être dans un lieu bruyant entourée de plein de personnes et de faire ma sociable!!» (vous voyez ce que je veux dire!).
Finalement, le fait d’analyser tout en profondeur amène souvent une sursimulation et une surcharge mentale et émotionnelle. Dans la 2e partie, je m’attarderai sur des trucs concrets pour réduire et gérer cette surcharge. Ce qu’il faut garder en tête par contre, c’est qu’au-delà de la (maudite hihi) surcharge, se trouve une grande capacité d’analyse, d’évaluation, d’adaptation à l’autre et souvent de création. Donc, lorsque l’on apprend à utiliser cette force : sky is the limit! Les hypersensibles sont souvent très bons dans leur domaine, s’ils trouvent ce qu’il leur convient et suivent leur petite voix intérieur 😉 Le problème réside souvent dans le fait d’accepter ce sentiment d’être différent et de ne pas « entrer dans le moule ».
Mise en situation
Donc si on essayait de voir à quoi ressemble le quotidien d’un adolescent hypersensible. Imaginez, avec ce que vous venez d’apprendre, l’adolescent.e hypersensible qui arrive à l’école dans les casiers bondés pour se rendre dans son cours où la prof. ne va pas bien ce matin-là et est plus irritable. Après quelques minutes dans le cours (sous les néons), les élèves se placent en équipe pour faire un travail et le niveau de bruit monte en flèche. Lorsque le travail se termine, les élèves se replacent en individuel (mouvement, bruit de bureaux), mais deux d’entre eux ne cessent de parler fort et l’enseignante monte le ton de plus en plus. La pause arrive : brouhaha dans l’école, changement d’enseignant (et d’humeur), examen stressant, élèves qui parlent à côté… dîner, cafétéria (bruit!)… cours d’éducation physique, bruit, odeur, mouvements…. Fin des cours : entraînement, entraîneur (et nouvelle humeur), coéquipiers (humeurs, personnalités, interactions), bruits, néons…. Vous commencez à comprendre… 😉 Et là l’entraîneur met l’adolescent.e en situation de stress et POUF ça ne fonctionne plus. Surcharge. Sursimulation. Incapacité de faire face à la situation. Est-ce que ce stress est gérable normalement? Surement. Est-ce que l’entraîneur est mauvais? Surement pas. Mais le tout ensemble, c’est juste trop.
Et comme le sommeil nous permet d’assimiler la journée he bien, les rêves sont à l’image de la réalité! Donc, le sommeil peut souvent être perturbé par des rêves intenses que l’on ressent aussi intensément. Alors indulgence envers les enfants qui ont un sommeil difficile et qui ont besoin de se faire valider leur craintes suite à un rêve qui n’est certainement pas « juste un rêve » pour eux 😉 Si l’adolescent.e dort mal par la suite, il part déjà avec une fatigue et donc, une moins grande capacité à gérer le tout. Et la journée recommence…
Avant même que vous lisiez la partie 2 qui suivra bientôt, vous avez compris que la récupération, les pauses, le calme et la pleine conscience sont plus qu’utiles!
Il y aurait encore plein de subtilités vous aurez compris. Mais je pense que le portrait général est brossé. Maintenant que vous comprenez un peu plus votre enfant, un de vos athlètes ou une personne de votre entourage vous pourrez ajuster votre accompagnement ou votre support au quotidien à l’aide de la partie 2 qui suivra bientôt. Si ce sujet vous interpelle les livres ci-dessous vous aiderons à approfondir le sujet encore plus 🙂 et vous pouvez même trouver un petit questionnaire pour vous penchez sur les caractéristiques ici.
À bientôt.
Références:
Aron, E. N. (2019) Aimer quand on est hypersensible: comprendre et mieux vivre vos relations quand le monde vous dépasse. Paris: Leduc.s édition.
Aron, E. N. (2013). Ces gens qui ont peur d’avoir peur. Mieux comprendre l’hypersensibilité. Montréal: édition les hommes.
Clobert, N. (2017). Domptez votre hypersensibilité. Paris: Leduc.s édition.
L’enfant hypersensible. Naître et grandir, consulté au https://naitreetgrandir.com/fr/etape/1_3_ans/comportement/fiche.aspx?doc=enfant-hypersensible
Questionnaire sur l’hypersensibilité d’Elaine N. Aron, consulté au https://www.leshypersensibles.ch/assets/test-hypersensibles-a30279cc86da49a765365f9e77cd2226cc30fc4a2c8c3521cbdd1d5182e5e4d2.pdf